Visite à Paris : L’agenda secret de Ouattara : Le transfèrement de Soro

Publié le par thruthway

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Lu pour vous dans le quotidien « Le Temps » de ce jour

 

 

La descente aux enfers de «l’enfant terrible» de l’ex-rébellion ivoirienne s’amorce, lentement mais sûrement. Son transfèrement à la Cour pénale internationale (Cpi) est désormais acquis et ne devrait plus être qu’une question de temps. Et c’est pour régler les «détails pratiques» de cette opération que Ouattara s’est envolé depuis le mercredi 25 janvier 2012 pour la France où il doit discuter de la réalisation de ce projet. Cette visite de 3 jours à Paris n’a, en fait, d’autre but que ce sujet «sensible», entre autres consignes que le nouvel occupant du palais d’Abidjan doit prendre auprès de Sarkozy.

 

Elle intervient après le séjour de la secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton dans la capitale économique de la Côte d’Ivoire. L’émissaire de la Maison Blanche était, l’on s’en souvient, venue signifier à Ouattara que : «Les Etats-Unis souhaitent que Guillaume Soro et tous les proches du pouvoir qui auraient pu commettre des crimes et des exactions en Côte d’Ivoire comparaissent devant la Cour pénale internationale, même en qualité de simples témoins», a rapporté le confrère Jeune Afrique qui tenait ces propos d’une source américaine. D’où la pression qui pèse sur les épaules déjà endolorie d’un Ouattara croulant sous le poids des difficultés économiques et politiques pour lesquelles il n’a pas de «solutions».

 

Les échanges entre Sarkozy et le pouvoir délégué d’Abidjan devraient porter sur la date, les chefs d’accusation à invoquer, les modalités du transfèrement et ainsi que la période des auditions par les juges. Car, si Hillary Clinton a voulu prendre des gants, de façon très diplomatique, pour ménager les susceptibilités en disant que Soro pourrait n’être qu’un «simple témoin», il est évident que lorsqu’on est suspecté de crimes et d’exactions, on ne comparait pas «en qualité de simple témoin» mais comme un accusé qui encourt une condamnation. Il va sans dire qu’Obama, à la veille de la présidentielle aux Usa, ne veut pas que ses adversaires retournent son rôle dans la crise ivoirienne contre lui. Il faut donc faire le ménage. Mais l’affaire est délicate.

 

 

Soro : une bombe qui peut exploser à la figure de Ouattara

 

 

Car livrer Guillaume Soro à la Cpi n’est pas une banale opération de routine pour les comploteurs. Même quand on a installé, parrainé puis appuyé militairement une rébellion pendant 10 ans et qu’on pense à juste titre avoir les moyens de la maîtriser, la décapitation aussi brutale d’un mouvement armée reste une manoeuvre très risquée. Surtout quand cette rébellion constitue l’ossature et la substance même du pouvoir qui a été installé à la suite du complot. Car, Soro et les proches du pouvoir dont parlent les Usa, pour ne pas dire les Com’Zones et autres chefs ou seigneurs de guerre devenus des officiers dans la «nouvelle Armée» hybride et difforme de Ouattara, n’ont guère l’intention de se laisser embarquer aussi facilement pour la Haye. Ni l’actuel Premier ministre, chef déclaré du Mouvement (rebelle) patriotique de Côte d’Ivoire (Mpci) devenu les «Forces nouvelles» dont il est le secrétaire général, ni ses hommes n’ont l’intention de moisir au frais, dans une cellule à la Cpi, alors que le moment est venu pour eux de profiter des douces joies du pouvoir, après 10 années de rébellion et de sacrifices pour porter Ouattara sur le trône. Sur ce point, Soro et les autres probables boucs émissaires sont clairs. «Je ne suis pas un simple Premier ministre et député, mais j’ai une armée derrière moi», aurait déclaré en privé le chef de la rébellion, agacé par la tournure que prennent les choses.

 

Cette mise en garde à peine voilée du filleul au mentor signifie que les l’ex-rébellion des Forces nouvelles devenue Frci pourrait en découdre avec Ouattara, dès que le processus de transfèrement des moutons du sacrifice sera enclenché. On sait qu’entre l’occupant du palais logé à Abidjan et les chefs de guerre de Soro retranché prudemment dans les zones sous leur contrôle, c’est la veillée d’armes depuis plusieurs mois.

 

Même si personne n’ose pour l’instant mettre le pied dans le plat de la discorde, la confiance, selon des sources proches de la Primature, est définitivement rompue entre le pouvoir civil et son bras armé. On sait que Ouattara et son chef de gouvernement sont en froid. Le second accuse le premier d’«ingratitude». Mais le premier n’a pas d’état d’âme. En fait, il n’a pas le choix. Face à la pression de ses alliés extérieurs, il ne peut que s’exécuter. Dans un contexte où l’opinion internationale s’est retournée contre lui en ce qui concerne les «responsabilités des deux camps» dans les crimes commis en Côte d’Ivoire depuis 2002, il ne peut plus empêcher son camp de comparaître. S’il veut sauver sa tête à lui, il est obligé de livrer ses filleuls. De ce fait, Ouattara doit pouvoir noircir Soro pour justifier son arrestation prochaine.

 

 Il nous revient que le rdr aurait, dans les coulisses, attribué à Soro la responsabilité de l’attaque contre le meeting du Fip qui a fait 2 morts et plusieurs dizaines de blessés chez les partisans de Laurent Gbagbo, le samedi 21 janvier 2012, à la Place Ficgayo à Yopougon. En sourdine, le Premier ministre serait présenté comme le «premier responsable» de ce dérapage, en tant que chef du gouvernement. De toutes les façons, Il y a longtemps que Ouattara a désavoué son Premier ministre pour son «échec au plan sécuritaire». Mais en vérité, le mentor du rdr reproche à Soro de n’avoir pas été en mesure de maîtriser la rébellion qui lui a été confiée en 2002, après l’arrestation de Laurent Gbagbo par l’armée française, le lundi 11 avril 2012. Car, ce sont les exrebelles, rebaptisés force pro Ouattara puis Frci, qui ont donné mauvaise réputation à son régime.

 

En commettant les génocides, les massacres, les assassinats et les exactions qui lui pendront toute sa vie au pied, comme un boulet. Qui plus est, confronté à la révolte des Frci qui se sentent aujourd’hui trahies et humiliées par leurs «employeurs», Ouattara n’accepte pas que Soro laisse son propre montre se dresser contre lui, au moment où il est installé au pouvoir. Pour lui, c’est une défiance de la part de ses filleuls.

 

 

La Licorne pour «mater définitivement» la rébellion

 

 

Mais Ouattara peut élaborer ses plans et trouver des raisons de les jeter en prison après s’être servi d’eux, les seigneurs de guerre ne s’en laissent pas compter pour autant. Ils se disent sereins et ont promis un accueil particulièrement chaleureux à ceux qui viendront les chercher sur le terrain. Ils n’ont pas oublié ce qui est arrivé à Ib et les moments difficiles que vit actuellement Wattao, suspecté de sympathie avec l’ancien régime.

 

Soro lui-même pourrait « se retirer », dans les jours qui viennent, à Bouaké, pour voir venir les choses. C’est dire que le clash est imminent. Mais qui désarmera Soro et ses ex-rebelles pour les arrêter avant de les transférer à la Cpi? On connaît la situation dans laquelle Ouattara a mis l’armée régulière. En disgrâce parce que soupçonnée d’être restée pro-Gbagbo, elle a été traquée, démembrée et désarmée pour être placée hiérarchiquement sous le contrôle des hommes de

Ouattara.

 

 

Qui donc tiendra Soro et son « armée » en respect ?

 

 

La réponse est évidente : La force française Licorne. Ironie du sort ! Celui qui a installé la rébellion pourrait être aujourd’hui amené à la démanteler lui-même. Car lui seul en a la capacité, dans la situation actuelle. On sait surtout que Nicolas Sarkozy en difficulté face à ses adversaires dans la campagne présidentielle en France, par ces sales temps de crise économique en Europe, est sur la brèche. Et l’Elysée envisage de mettre fin à ses campagnes militaires stériles à travers le monde, à commencer par l’Afghanistan où «l’armée française n’est plus en sécurité».

 

Aussi la force Licorne dont le départ est à l’ordre du jour, pour rait-elle être chargée d’une ultime mission : débarrasser le pays de la rébellion. En commençant par la décapiter, avant de «neutraliser les éléments dangereux qui refusent de désarmer». A Paris, le sort de Guillaume Soro et de sa rébellion se jouent actuellement. Et les jours qui viennent seront certainement riches en évènements.

 

 

 

K. Kouassi Maurice.

Publié dans Actualités politiques

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