Amani Nguessan Michel: «Le Rdr a été violent dans l’opposition, il demeure violent au pouvoir»

Publié le par thruthway

Amani Nguessan Michel, secrétaire à la Défense du Fpi

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«Le Rdr a été violent dans l’opposition, il demeure violent au pouvoir»

 

 

Que retient-on après le meeting interrompu du Fpi le samedi 21 janvier dernier ?

 

Il faut reconnaître que nous avons été vaincus militairement le 11 avril 2011. Nous avons pris acte de cette défaite. Mais nous entendons jouer notre rôle d’opposants et c’est ce que nous avons décidé de faire en organisant des meetings et certainement plus tard des marches, des sit-in, des conférences etc. Le samedi 21 janvier 2012, nous avons organisé un meeting avec l’accord des nouvelles autorités. L’autorisation préalable des autorités n’est pas nécessaire. Une information desdites autorités suffisait. Mais avec la situation que nous vivons, il était tout à fait normal qu’on s’accorde sur tous les aspects avec les nouvelles autorités. C’est ce que nous avons fait. Le jour du meeting, malheureusement nos militants ont été attaqués par des forces inconnues. Bien entendu, les assaillants étaient armés de pierres, de gourdins, d’armes à feu, de grenades lacrymogènes, d’armes blanches…et ils étaient très déterminés. Malgré les deux ceintures sécuritaires que nous avions, à savoir l’Onuci, la police et la gendarmerie nationales, ils ont réussi à les franchir. A ce niveau, il faut relever la facilité avec laquelle les assaillants ont, franchi les deux barrières que nous avons indiquées. C’est pourquoi nous suspectons les autorités actuelles d’être complices des assaillants. Si elles étaient venues pour sécuriser la manifestation, il serait impossible que ces assaillants-là franchissent ces deux barrières. Mais ils ont pénétré ces obstacles pour attaquer les militants. Plus grave, les militants qui étaient attroupés les mains nues ont pu soutenir la police nationale dans la défense de tout ce monde attroupé et quelques instants après, la police et la gendarmerie ont disparu, l’Onuci aussi. Et les militants se sont retrouvés face-à-face avec les assaillants. Bilan : un mort, 68 blessés, 7 cas graves, un enlèvement. C’est grave pour la République et la démocratie. Et nous regrettons amèrement cela. Du temps de M. Gbagbo, la démocratie était à un niveau que nous regrettons aujourd’hui.

 

Alassane Dramane Ouattara a dit à Paris que le Fpi empêchait en son temps le Rdr de manifester…

 

Cela me fait sourire car ce n’est pas juste. Le ministre de l’Intérieur que j’ai rencontré m’a affirmé qu’il ne saurait interdire les meetings du fpi car au moment où le fpi était au pouvoir, il les laissait se réunir et organiser leurs activités. D’où vient le fait que M Le Président et son ministre se contredisent ? La vérité, comme le disait le ministre de l’Intérieur est que, nous laissions toute organisation politique se réunir librement.

 

La presse proche du Rdr évoque des brimades et autres tueries dont les militants du Rdr auraient été victimes sous le régime Fpi, d’où une sorte de retour du bâton…

 

vous savez bien comment ils excellent dans les montages. Les Ivoiriens sont témoins et ont vu la démonstration qui a été faite que tout ce qui se disait de méchant sur le compte du Président Gbagbo Laurent et les siens n’était que montage… le Rdr voulait à tout prix le pouvoir. Il a utilisé le mensonge, la manipulation et la force. Même au pouvoir, le Rdr persiste dans le mensonge et la force brutale. Nous, nous ne sommes pas un parti brutal, un parti de violence. Depuis toujours, le président Gbagbo a dit qu’il n’utilisera jamais la force pour accéder au pouvoir. Il fallait démocratiser le pays pacifiquement. Depuis, c’est cette ligne-là que nous suivons. voyez-vous, M. Gbagbo a passé 30 ans dans l’opposition contre le Pdci-Rda, jamais il n’y a eu de coup d’Etat ni de violence. Mais depuis 1993, lorsque le président félix Houphouët Boigny décède, et depuis 1994 que le Rdr est né, la violence a fait son entrée en Côte d’Ivoire. En 1993, M. Ouattara était opposé à la prise du pouvoir par M. Bédié, c’était une forme de violence. Ne pas respecter la Constitution ivoirienne en déniant à M. Bédié son droit d’être le dauphin constitutionnel, était une forme de violence. Et depuis que cette violence a commencé, nous y sommes jusqu’aujourd’hui. Le Rdr a été violent dans l’opposition, il le demeure aujourd’hui au pouvoir. En revanche, le fpi dans l’opposition comme dans l’exercice du pouvoir d’Etat n’a jamais fait preuve de violence. Quand on laisse le fpi agir conformément aux principes démocratiques, il n’y a pas de problème. En septembre, nous avons organisé le premier meeting à Koumassi. Nous n’avons pas eu d’opposition, d’agression. Tout s’est passé normalement. Et comme s’ils regrettaient de nous avoir laissé faire ce meeting, depuis ce jour, tous nos meetings sont attaqués. Evidemment, nous ne sommes pas des gens violents donc nous ne nous préparons pas à la violence. Mais, ils continuent les actes de violence sur les militants du fpi de façon gratuite. Après cette agression, nous pensons que trop, c’est trop. Il faut que cela s’arrête.

 

Ces attaques ne vont-elles pas dissuader les militants du FPI pour les prochaines actions ?

 

Peut-être que c’est une méthode pour le Rdr pour «pacifier» le pays. Mais il procède mal. J’ai toujours dit qu’on peut obtenir l’accalmie par la force mais jamais la paix. Donc le Rdr se trompe. C’est pourquoi je demande au Rdr et au président Ouattara de se ressaisir en changeant de méthode. La meilleure façon de vivre en société, c’est de cultiver les valeurs que sont : l’amour, la tolérance, la fraternité et le pardon. Aujourd’hui, il y a une sorte de vengeance inexplicable qui ressort de l’attitude des militants du Rdr… M. Ouattara a voulu le pouvoir à tout prix. Le but est atteint. Que la violence cesse pour donner des chances au «vivre ensemble» de se réaliser.

 

Certains observateurs estiment que Ouattara et le Rdr donnent une leçon de gouvernance au fpi

 

Non, ils font une mauvaise analyse et un mauvais procès au fpi. Pensez-vous que c’est de cette façon violente qu’il faut diriger le pays aujourd’hui ? Non, le temps des dictatures est passé. Les Mussolini, Hitler… ont régné, mais leur époque est révolue. Aujourd’hui, nous sommes à l’ère moderne, l’Afrique a évolué, le temps des royaumes, des empires est passé. M. Ouattara gouverne comme s’il était dans un empire et malheureusement, il est allé confirmer cela à Paris. Là-bas en france, il a dit qu’il fait «un rattrapage» c’est pourquoi il nomme les nordistes. Mais nous ne sommes pas dans un empire des Nordistes. C’est cela la réalité.

 

Ouattara dit aussi que Gbagbo nommait des nonnordistes…

 

vous êtes en Côte d’Ivoire, vous connaissez la réalité. Jugez-en vous-mêmes. Quand M. Gbagbo était là, son premier ministre Guillaume Soro était du Nord, le président du Conseil Economique et Social était du Nord, le Grand Chancelier et le Président de l’Assemblée nationale également. Au niveau de l’armée, il a nommé M. Mangou, chef d’Etat Major, ce n’est pas un Bété et on peut faire le même constat d’ouverture et d’équité au niveau de l’administration générale. Je voudrais vous dire qu’en ce qui me concerne personnellement, j’ai été nommé ministre de la défense alors que je suis Baoulé, donc d’une autre région que la région d’origine de M. Gbagbo. Je voudrais vous faire remarquer que depuis que la Côte d’ivoire est indépendante, aucun chef d’Etat n’a choisi pour ministre de la Défense un citoyen en dehors de son groupe ethnique.

 

M Houphouët-Boigny, durant son long règne, a toujours choisi un Baoulé, M. Bédié a choisi un Baoulé. Quant à M. Guei Robert, il s’est proclamé lui-même ministre de la Défense. C’est seulement avec M. Gbagbo, grâce à son ouverture et à sa capacité de rassembler les ivoiriens, qu’il a nommé un ministre de la Défense qui n’est pas de son ethnie. Ce faisant, il a mis l’accent sur les valeurs des citoyens plutôt que sur la tribu. Il a fait du rassemblement des ivoiriens, une exigence dans sa politique de nomination au poste de responsabilité. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Les recrutements tribaux se font chaque jour dans l’administration, à la police, partout…

 

Que faites-vous pour vous opposer à cette tribalisation de l’Etat ?

 

vous savez aujourd’hui que nous contestons dans la globalité la nature du pouvoir en place. Ce ne sont pas les détails qui sont le problème. Lorsque la démocratie sera au moins appliquée par ce régime, il y aura maintenant à regarder à l’intérieur de la démocratie, voire ce qui ne marche pas bien. Mais pour le moment, c’est la démocratie et l’Etat de droit qu’il faut rappeler à la vie. Un accord de défense a été signé lors de la visite d’Etat du président à Paris.

 

Vous qui avez été ministre de la défense, quel commentaire faites-vous de cet acte ?

 

Je pense qu’avec la signature de cet accord, M. Ouattara vient de démontrer qu’il a un pouvoir dictatorial. Il y a des actes tellement importants dans la vie des peuples qu’un individu, fut-il président de la république, ne peut s’arroger le droit de façon unilatérale de prendre des engagements. M. Ouattara prend des engagements au nom du peuple de Côte d’Ivoire tout seul. C’est très grave ! Nous sortons de la situation d’exception et il n’y a pas d’urgence. Il aurait fallu murir le projet en Côte d’Ivoire, le soumettre à l’Assemblée nationale, voir à un referendum. Un engagement de cette nature au plan militaire, c’est une restriction des libertés d’un peuple alors que depuis 1960, nous sommes indépendants. Et aujourd’hui, le maintient du 43e Bima, le rôle de l’armée française en Côte d’Ivoire, sont une atteinte à l’indépendance de notre pays. Vous savez qu’un pays repose sur un certain nombre de libertés, il doit pouvoir se défendre. Quand j’étais ministre de la défense, le président Gbagbo avait proposé la révision de ces accords de défense signés sous Houphouët Boigny. On était très avancé. On était arrivé à un stade où le 43e Bima devait fermer. Le principe était acquis. La crise n’a pas permis la concrétisation de ce projet qui marque la marche de la Côte d’Ivoire vers l’indépendance réelle et totale. Avec cette signature, la Côte d’Ivoire 52 ans après la proclamation de son indépendance vient volontairement remettre en cause sa souveraineté.

 

Que dites-vous des termes desdits Accords ?

 

Justement, nous ne savons rien des termes des Accords et c’est ça la dictature. C’est-à-dire que M. Ouattara seul sait ce qu’il fait pour la Côte d’Ivoire et il engage le pays selon sa seule volonté. Ce n’est pas normal.

 

D’aucuns disent qu’il est allé chercher les moyens de sa protection…

 

Vous savez, dès l’instant où M. Ouattara est arrivé au pouvoir par la force militaire, il pense que c’est dans la terreur qu’il peut obtenir la paix pour gouverner. C’est une erreur. La force n’a jamais eu raison de la détermination d’un peuple engagé résolument dans la conquête de ses libertés. La France elle-même qui colonisait la Côte d’Ivoire, a eu à affronter le peuple ivoirien conduit par Félix Houphouët Boigny. Cette Côte d’Ivoire-là a réussi à obtenir son indépendance en 1960. Une indépendance peut-être théorique, mais aujourd’hui les générations présentes ont pour devoir de préserver les acquis et de caresser le désir de les accroître. Il a été aussi question de la privatisation des banques nationales…

La banque est un moyen d’enrichissement individuel ou Etatique. C’est le moyen le plus sûr pour mobiliser l’argent nécessaire au développement d’un pays. Cependant, il faut préciser que le développement national ne peut se faire dans l’aliénation, dans la domination extérieure. Tout dépend de l’origine du capital mobilisé dans les banques. Les libéraux moins indépendantistes, moins souverainistes choisissent l’ouverture du capital des banques. Alors deux questions se posent : Y’ a t’il des nationaux capables d’être actionnaires majoritaires ? La conscience politique de ces actionnaires leur permet-ils d’investir dans le développement national ?

 

Si oui, l’option de la privatisation est sans conséquences graves pour le pays qui l’applique. Dans le cas de la Côte d’Ivoire, nous ne théorisons pas vainement. Il faut être réaliste, donc pragmatique. De tous les domaines qui produisent la richesse financière, seule l’agriculture demeure le secteur national, facteur de création d’importantes richesses financières.

 

Quel est le niveau de conscience politique du monde paysan en Côte d’Ivoire ?

 

C’est pourquoi l’Etat Ivoirien a une lourde responsabilité. Celle de conduire le développement national en s’appuyant sur des banques à capitaux nationaux. L’Etat Ivoirien doit s’imposer deux devoirs : Mobiliser et gérer dans l’intérêt national l’épargne. Cela doit être la vocation de l’Etat Ivoirien. Telle est la vision dans laquelle nous croyons. La banque nationale la plus puissante que la Côte d’Ivoire devait avoir devait être la B.N.D.A. Mais l’absence de conscience politique autocentrée et la mauvaise gestion des dirigeants à l’époque a entraîné la dissolution de cette banque.

 

En Côte d’Ivoire, on confond la mauvaise gestion d’une structure liée à la faiblesse humaine et l’inefficacité d’un choix. Je ne vois pas la privatisation des banques comme moyen de développement national. Bien au contraire, c’est le moyen le plus sûr de maintenir les pays sous développés dans le sous développement et laisser les puissances occidentales diriger l’économie mondiale avec une répartition des tâches qui maintient la Côte d’Ivoire dans le rôle exclusif de producteur de matières premières brutes et de consommateur des produits des pays industrialisés. C’est pourquoi je condamne cette politique de privatisation des banques nationales. Mais je ne suis pas naïf. Je sais que les parrains de M. Ouattara l’ont soutenu pour briser la capacité de résistance économique et politique de la Côte d’Ivoire. Pour le moment, il ya deux secteurs qui sont attaqués. L’armée et les banques. C’est à dessein. Dans ces conditions, A dieu l’indépendance. Adieu la souveraineté. C’est ce qui justifie notre cri de détresse.

 

Quel commentaire faites-vous du caractère somptueux et royal de la visite de M.Ouattara à Paris ?

 

Comme je viens de vous le démontrer M. Ouattara est le chef d’Etat africain qui permet la survivance de l’impérialisme occidental. La survivance du néo-colonialisme. Il ne faut pas oublier que l’impérialisme est fils de la révolution industrielle en Europe. L’Afrique est devenue utile parce qu’elle est pourvoyeuse de matières premières brutes et consommatrice des produits de l’industrie européenne. Tout chef d’Etat africain qui ne remet pas en cause ce rapport de domination et d’exploitation de nos Etats est le chouchou des Occidentaux.

M. Ouattara durant tout son mandat sera adoubé dans toutes les capitales occidentales mais sera vomi par tout Africain en qui il ya un peu de dignité et d’honneur. M. Gbagbo incarne ce type d’Africain. C’est pourquoi il ne pouvait être l’ami des occidentaux, l’ami de la france néo coloniale. Le combat de Gbagbo est le combat d’une nouvelle conscience africaine qui met l’Afrique au service des Africains d’abord. La partie visible de cette nouvelle conscience en Côte d’Ivoire était le budget sécurisé, le démentellement du 43e Bima, la nationalisation des banques, un nouveau comportement vestimentaire, la reforme de la filière café, cacao… Gbagbo ne peut être reçu en France comme Ouattara, car le jour où l’Afrique prendra son envol, la France ne sera plus une puissance mondiale. Souvenez-vous, les 1ères puissances mondiales étaient l’Espagne et le Portugal à cause du commerce méditerranéen. A la faveur du développement du commerce trans-atlantique au détriment du commerce méditerranéen, ces Etats ont perdu leur position de puissance. Dans les relations internationales, il y a la dynamique de l’expansion ou de la récession économique.

 

On dit du fpi qu’il n’est pas humble malgré la perte du pouvoir d’Etat…

 

Non, ce n’est pas juste. Nous avons notre vision du développement et nous la défendons crânement. Eux, ils ont leur vision du développement que nous condamnons. Ça dépend donc du bord où on se situe. Quand vous vous situez du côté du fpi indépendantiste, souverainiste, qui prône la dignité des peuples d’Afrique, vous comprenez donc notre discours. Mais quand vous vous mettez du coté des autres qui ont une vision anti-nationaliste, vous comprenez aussi leur discours. Ce sont deux discours qui s’affrontent, il faut qu’un triomphe dans ce pays et aussi en Afrique pour le bonheur de l’Afrique ou son malheur. L’avenir nous situera.

 

Quels sont aujourd’hui les rapports entre le Fpi et la communauté internationale, notamment l’International Socialiste et le Parti Socialiste ?

 

Ce sont de bons rapports sauf qu’à la différence du régime de M. Ouattara, nous voulons un partenariat dans la responsabilité, dans la dignité des peuples, un partenariat gagnant-gagnant. Il y a une certaine communauté internationale qui veut un partenariat dans l’absence totale de responsabilité et de dignité des peuples africains. Ce que nous ne pouvons accepter. C’est pourquoi aujourd’hui, ce que nous disons et la communauté internationale est obligée de nous suivre dans cette logique, c’est oui à la coopération internationale mais dans l’égalité et la considération des Etats. Il n’y a pas de petits Etats dans les relations internationales. Vous comprenez bien que la France a besoin de la Côte d’Ivoire et la Côte d’Ivoire a besoin de la France. D’où vient le fait que vous voulez vous appuyer sur nous pour votre développement sans nous respecter ? Et c’est ce que Gbagbo Laurent demande : le respect réciproque dans les relations d’Etat à Etat.

 

Gbagbo à la Haye depuis quelques temps, quelles perspectives pour la Côte d’Ivoire ?

 

Gbagbo à la Haye, c’est la volonté des impérialistes d’arrêter le développement des Etats africains en tuant la conscience nouvelle des intérêts africains incarnés par un africain. C’est peine perdue par ce que la fermeture des universités en Côte d’Ivoire n’empêchera pas l’évolution des idées en Côte d’Ivoire et par conséquent la prise de conscience des intérêts nationaux. Au plan national, les Ivoiriens sauront que la France veut les distraire pour les éloigner du chemin du développement. Les Ivoiriens, au nom de l’intérêt national feront preuve de dépassement pour se donner la main, afin d’assumer toutes les responsabilités nécessaires au développement de la Côte d’Ivoire. Nous nous réconcilierons pour faire échec aux vampires des Etats africains. Aujourd’hui la douleur morale née de l’atrocité de la longue crise ivoirienne fait perdre la raison à certain de nos concitoyens. Le temps et les intérêts sauront nous rassembler à nouveau. Et la Côte d’Ivoire redeviendra un pays de paix où il fera bon vivre. La bonne conscience est nourrie à la sève de la vérité et la mauvaise conscience est nourrie à la sève du mensonge. Ces deux consciences ne peuvent pas prospérer en même temps tout le temps. Le bon triomphera surement du mauvais.

 

Le pouvoir dit que la réconciliation est possible sans Gbagbo…

 

Mais ils sont en train de vérifier cela. Qu’ils nous disent depuis le transfèrement de Gbagbo si la vie nationale a connu une amélioration… La vérité finira par triompher. La vraie réconciliation doit se faire entre les pro-Gbagbo et les pro-Ouattara. Chaque camp dirigé par son chef sous l’arbre à palabre. Ouattara estime de Paris que la sécurité est revenue en Côte d’Ivoire…

L’un des secteurs le plus détruit est celui de la défense intérieure et extérieure. Suite à cette crise, on ne peut pas aimer la Côte d’Ivoire et se réjouir de ce qui reste du système sécuritaire ivoirien. Ce qui fait la force des armées, c’est d’abord et avant tout la cohésion et la discipline. Cette cohésion et cette discipline n’existent plus au sein de notre armée. La force d’une armée c’est aussi la formation qui met l’accent sur le civisme et le sens de l’Etat. Ces concepts ont été détruits. Il n’ya de forces armées que par rapport à des individus. On parle des pro-Gbagbo et des pro-Ouattara peut-être des pro-Soro et des pro-Bédié. Il y a un travail de reconstruction des armées en Côte d’Ivoire. Il ne faut pas l’occulter. Le problème ne se pose pas en terme de moyen matériel.

 

Il faut donner des moyens à qui ? Pour quoi faire ?

 

La réforme de l’armée doit être l’affaire de tous pour que du consensus se dégage une nouvelle armée au service de la Côte d’Ivoire. Ce qui est loin d’être le cas. La réalité des armées aujourd’hui est source d’insécurité individuelle et collective. M Ouattara avait reçu une délégation du Fpi, ensuite son ministre Hamed

Bakayoko et puis plus rien. Aujourd’hui, qu’en est-il du dialogue républicain avec l’opposition politique ? Pour le pouvoir, nos rencontres au sommet sont liées à des intérêts de circonstances. M. Ouattara voulait que le fpi participe aux élections législatives. Il a rencontré le fpi. Pour M. Ouattara le prétexte de la rencontre suffisait pour que le fpi participe à ces élections. Pour le fpi, la résolution des problèmes posés suffisait pour participer à ces élections. Les objectifs du dialogue étant différents, il y a eu un dialogue de sourds sans effet.

 

Aujourd’hui, nos problèmes demeurent de part et d’autre. Je viens de vous parler de l’armée. Sans consensus autour de l’armée, il ne peut avoir de démocratie. C’est de façon consensuelle que nous devons mettre en place la nouvelle armée. Nous ne voulons pas d’une armée des vainqueurs, une armée contre une partie des ivoiriens. Il faut créer le cadre inclusif de discussion pour engager tous les ivoiriens dans un élan de solidarité et de fraternité.

 

La Côte d’Ivoire des 322 462km2 est notre patrimoine commun. Il peut arriver des problèmes entre les enfants de ce pays, mais comme le dit le président Gbagbo, il faut qu’on accepte de s’asseoir pour discuter. Et chaque fois qu’on a accepté de s’asseoir pour discuter, on a toujours trouvé des solutions. Ne pas discuter, c’est refuser de placer le pays au rang des Etats développés car sans paix, il ne peut y avoir de développement. Nous tendons toujours la main, nous sommes toujours disponibles pour aller à la discussion. Il faut qu’on discute dans ce pays des problèmes majeurs pour que du consensus la Côte d’Ivoire renaisse une, indivisible, prospère et paisible.

 

Interview réalisée par :

Guehi Brence

Source : Le Temps

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Publié dans Actualités politiques

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